Lettre à mes frères et sœurs trop gros!

TÉMOIGNAGE DE KIM (TITRE REPRIS D’UN LIVRE)

Bonjour,

Je m’appelle Kim et depuis l’âge de 12 ans, je vis dans un corps de grosse. Bien sûr, pour bien faire, il y a eu plein d’épisodes de perte de masse (gras et muscle).En effet, « je me suis amusée », près de 10 fois, à prendre environ 30 kgs, et à les reperdre. Parfois, la perte était extrêmement rapide (en moins de 3 mois). Ma dernière période de grosse bouffe en continu pendant des semaines va de mai 2014 à mars 2015. Et, après cela, oh miracle, je suis passée de la taille 48 en Mars 2015 (avec un ventre de femme enceinte de 3-4 mois) à la taille 40 aujourd’hui.

Toi qui lis ces mots, tu as du t’arrêter à la dernière phrase, où je parle de la phase descendante. Peut être penses tu que je suis une superwoman, que j’ai un coach, une équipe de diététiciens, et un abonnement à un club de sport select. Rien de tout cela n’est vrai (non, je ne suis pas une superwoman…)

Commençons par l’engraissement : De mémoire, je grossis uniquement parce que je mange beaucoup.
A l’adolescence, là où tout a commencé, je passais presque toutes mes après midi du weekend à lire (beaucoup) tout en mangeant beaucoup : du pain, du pain au lait, une pâte chocolatée, parfois du beurre, et une boisson très fraîche. Le tout à moitié allongée.
Pour ne rien arranger, ma maman, en bonne mère, aimait cuisiner en quantités, et surtout assez salé. Nous ne manquions pas d’amour et encore moins de nourriture.
Lorsque j’étais en couple, j’achetais une à deux pâtisseries (bien souvent, un opéra, ou un paris Brest) après le boulot avant de rentrer chez moi. C’était mon avant-dîner gourmand on va dire. Les weekends, mon ex et moi nous offrions une belle côte de bœuf à deux, accompagnée de généreuses portions de pommes frites, le tout arrosé de vin rouge. Et je ne parle pas des restaurants –aucun d’eux n’était diététique- dans lesquels nous aimions dîner au moins une fois par semaine. Résultat, nous avions beaucoup grandi en largeur durant les années que nous avons passées ensemble
Pendant mes crises, je planifiais mon gavage. Par exemple, j’ai fait des cures de sandwich kebab frites sauce samouraï pendant plusieurs soirs. D’autres fois, en une semaine, j’ai laissé plus de 40 euros dans une –par ailleurs excellente- boulangerie pâtisserie : baguettes, croissants, pains bio, de bonnes pâtisseries, quiches, et boisson sucrée. J’oubliais les fringales après le dîner (22h00, voire minuit) : je me refaisais un autre repas avec tout ce que j’avais sous la main comme par exemple, un gros ananas ou une papaye, ou des frites avec 2 steaks hachés, ou 8 pains au lait tartinés de Nutella, 2 œufs durs, une boîte de mais,…

Maintenant, je vais vous raconter comment je maigrissais vite : Ma première descente rapide date de mes 16 ans. J’ai tout combiné, et j’ai tout appris toute seule, en fait j’ai surtout mal appris : tisanes au séné (celles qui vous gardent aux WC), régime hyper strict (3 repas par jour, on mange avec le minimum de graisse, sucre éliminé entièrement, grignotage banni, pas de boisson pendant les repas et dernier repas avant 19h00) entrainement sportif digne d’un boot camp (course à pied quasi hebdomadaire, gym maison presque quotidienne, séances de muscu en salle, cours de tae kwondo, randonnée en montagne). Ce fut brutal, et les résultats aussi. En gros, j’avais retrouvé la silhouette longiligne d’avant mes 12 ans, et une certaine fierté (eh oui !!!). De plus, le sport à gogo, il parait que ça multiplie l’énergie de façon exponentielle. C’était vrai pour moi.
Depuis cette première tentative, qui malheureusement ne fut pas la dernière, ma recette a peu varié. Certaines personnes croient que c’est ma nature de perdre aussi « facilement », combien j’ai de la « chance ». D’autres me disent que j’ai cette facilité parce que je n’ai pas eu d’enfants. Je ne sais pas. Je sais juste que tant que je mange mal, beaucoup, je grossis.

Qu’est ce qui a changé aujourd’hui ?
En premier lieu, et c’est une révélation pour moi, je ne suis plus manichéenne : gros=mal, mince=bien ; nourriture=mal, contrôle=bien. Tout d’abord, parce que j’ai été mince, comme beaucoup de femmes. On n’est pas heureux parce que l’on est mince, ni même parce que cette nouvelle minceur résulte d’un combat. Autre chose : même en étant physiquement mince, dedans, je me voyais toujours grosse, grasse, un sac de pommes de terre. Cela ne changeait donc rien d’être mince, à part que je pouvais porter du 38 de chez Mango.

Comment je maigris aujourd’hui :
Avant de me pencher sur mon assiette, je vais vous parler de ma tête. Quand j’ai envie de manger, je me demande si c’est pour me distraire, comme on donne un jouet à un enfant, ou si c’est un besoin, et de quelle nature. Si c’est une envie d’un aliment doudou, je pense aux sdf à Paris qui ont faim ; je me rappelle des images d’enfants faméliques, et cela soulève une certaine honte de moi, personne privilégiée, qui joue avec la nourriture, qui mange pour tromper son ennui.
De l’autre côté, lorsque je n’ai pas faim, même à l’heure légale du repas, je ne me félicite plus, du style « super, tu as un coupe faim naturel » ; au contraire, je me demande si ce n’est pas une auto censure, si ce n’est pas un signe de déprime, si ce n’est pas par peur de trop remanger.
La danse classique que j’ai découvert il y a quelques semaines m’a beaucoup aidé, parce que c’est un sport qui fait prendre conscience de tout son corps ; sa pratique amène à travailler le plancher pelvien, à rechercher une posture correcte : alignement tête-nuque-vertèbres dorsales-bassin en gardant les épaules basses. Et on est obligé de gainer, surtout les fesses.
Mes choix alimentaires sont influencés par mes lectures. Je ne cherche pas seulement à maigrir, mais à manger pour être en bonne santé, à manger pour me faire plaisir. Vous vous demandez si je suis les conseils d’un nutritionniste. C’est un peu plus simple : Sur le net, on peut trouver toutes les typologies d’aliments, avec leur apport nutritionnel. On trouve aussi des millions de recettes.
Mes repas sont assez simples, cuisinés par mes soins. Les quantités ont diminué tout doucement mais sensiblement, sans me forcer, sans compter les calories.
L’attrait pour le sucré a diminué parce que je sucre moins (sirop d’agave, miel, fruits).
La nourriture saine (bio, de saison, du marché) me revient moins cher, quand je compare avec la folie de dépenses pendant mes crises.

Voilà !!
Avant de vous quitter, « mes frères et sœurs trogros », je tiens à vous dire que je ne sais pas si je regrossirais. Peut être que je ferais encore quelques yoyo. Aujourd’hui, je maigris pour être aimée d’abord par moi-même. Mais, plus important, je regarde mon gras, ma cellulite, et je m’aime comme je suis. Je maigris aussi afin de ne pas attraper les maladies que le gras peut occasionner : diabète, problèmes hépatiques ou cardiaques… Enfin, je maigris pour être libre, libre de manger tout ce que je veux. ( ? Est-ce possible ?)
Chers trogros, ce n’est pas mal de peser 10, 30,50 ou 100 kgs de plus que le poids santé que l’on pourrait avoir. Mais je crois à mon poids santé. Le poids santé est propre à chaque personne. C’est le poids auquel le risque de maladie est réduit, le poids auquel on peut marcher sans se déchirer la peau de l’intérieur des cuisses (oui, j’ai connu cela), sans que les genoux et les mollets fassent mal, le poids auquel on peut jouer avec ses enfants.
(Le poids de… )

A propos

Présidente de l'association Psychologue Clinicienne, psychothérapeute, spécialisée conduites alimentaires
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